Le trouble

Le Fantastic voyage est rythmé de moments forts dans le meilleur comme dans les pires galères.
Mais c'est dans les pires moments aussi. que l'on prend  pleinement conscience de notre aventure.
Cela fera de bons souvenirs, OUI!!! Mais avec quelque peu de recul. Sûr.
Ce campeur joue avec nos émotions.
Il faut dire qu'on ne le ménage pas, déjà la traversée du territoire effectuée, voilà maintenant qu'on lui fait escalader des sommets à le faire palir de vertige.
Bien qu'il en ait vu d'autres, cette fois-ci sa vieille mécanique n'a pas résisté.
Résultat, un moteur en surchauffe et de l'air dans le radiateur.
A ce moment là, le relief de ces montagnes reflète au mieux notre ressenti.
Drôle de contraste entre: un paysage sublime, un beau soleil, deux vacanciers heureux, fenêtres grandes ouvertes, écoutant de la bonne musique à bord de leur véhicule "récréatif" en route pour le Yukon, que demander de plus; et un véhicule en panne, dans la pente, perdu au milieu de nulle part, sur une route déserte, dans une chaleur accablante et pas la moindre trace de civilisation à des kilomètres.
Bel ascenceur émotionnel non?
Le scénario répétitif qui suit est assez cocasse et très fatigant: arrêter le van en surchauffe, enlever le bouchon du radiateur et de l'antigel, mettre de l'eau, chasser l'air, trouver de l'eau dans les ruisseaux ou rivières, faire des réserves d'eau, repartir, et ça ainsi de suite tous les dix ou vingt kilomètres.
Plus les jours passent et plus l'effort et les difficultés sont intenses, tel un chemin de croix pour atteindre le graal. C'est à se demander si on va finir sur les genoux ou en rempant.
Nous arrivons aux sources thermales de Liard, halte essentielle bien méritée et assez bénéfique. Se délassant dans un bouillon naturel à plus de 60 degrés. Ces sources offrent un effet purificateur, éliminant toutes toxines, atomisant l'organisme pour mieux repartir après une bonne nuit régénératrice.
Ca y est nous arrivons au Yukon, nous progressons!
Après 400km de panne nous arrivons à Watson Lake réputée pour sa forêt de poteaux indicateurs. Où beaucoup de voyageurs, passant par cette ville relais, placardent fièrement leur nom, origine, adresse ou toutes sortes de symboles les représentant. Cette forêt s'accroît de jour en jour et compte mieux de 60000 indications diverses plus la nôtre maintenant !!
Après un devis diagnosticant le joint de culasse :(  il nous fallait rallier Whitehorse, notre objectif de destination, dans les plus brefs délais, pour retrouver notre ami Axel et faire les réparations là-bas.
Le moteur ne pouvant plus continuer ainsi, la solution du remorquage était inévitable pour les derniers 450km.
Le service de remorquage étant trop cher (1500$) pour la distance, une autre solution devait être envisagée.
Direction le snack du village ou quelques vieux hommes se retrouvent autour d'un café avant d'aller travailler.
Expliquant notre problème, l'un d'eux nous trouva la solution dans l'après-midi pour 300$.
Délivrance !!! Une chance que nous nous somme levés tôt ce matin.
O h  m y  G o d !!! Nous avons devant nos yeux écarquillés la solution et pas des moindres.
C'est un gros truck de 35 pieds, un vrai, qui occupe tout notre champ de vision, et il a fière allure ce camion de routier nous éblouissant de ses chromes.
Notre joie est sans pareille, le moral est bon, cette fois nous allons à Whitehorse, et avec la manière.
Une fois le petit camion placé dans le gros camion, grâce au quai d'embarquement, à notre surprise nous nous faisons inviter pour souper par Laureen, Robert et leurs filles.
Une famille première nation Kaska qui gère le buisness en question de transport desservant les territoires du nord.
Un copieux barbecue nous attend, et il est amusant de voir que l'on veut nous montrer que dans cette famille la politesse et les bonnes manières sont de rigueur. Rebecca et Julie, les deux jumelles de treize ans, s'affèrent autour de nous, nous apportant tout le nécessaire jusqu'au sous-verres sans que l'on puisse aider, s'assurant à chaque instant que l'on ne manque de rien.
Laureen nous fait part du triste constat de la situation des peuples des premières nations avec un fort taux de suicide, diabète et alcoolisme totalement conditionnés par le gouvernement, parqués dans des réserves si ils veulent leurs indemnités sans qu'ils soient propriétaires de leurs terres... C'est un triste sort pour ces premiers habitants du Canada et une situation assez complexe!
En tout cas cette famille à de belles valeurs et nous en garderons de bons souvenirs.
Ensuite nous faisons la connaissance de notre chauffeur Bruce, un drôle de personnage. Routier dans l'âme, des magasines jusqu'au look camioneur.
La vie de routier est une expérience unique, juché en haut de la cabine, on a la sensation d'être le roi de la route.
Ce monstre de 18 vitesses et de mieux de 600000km au compteur en a encore sous le capot.
La machine, branchée sur une radio country, avale le bitume avec une certaine aisance. Notre trajet s'effectue de nuit, pour nous faire rappeler qu'il ne fait jamais nuit noire dans ces contrées hautes en couleurs.
Pour l'anecdote: notre première nuit a Whitehorse n'a rien de bien classique. Nous arrivons donc en toute discrétion vers 3h du matin et comme les quais de déchargement sont tous occupés, nous dormirons dans le van, lui même a l'intérieur du truck, en mode incognito ;)